Au Niger, une organisation de la société civile demande le départ des forces armées étrangères présentes sur le territoire nigérien. En effet, le 10 février dernier, la région de Tillabéri a été le théâtre d’une attaque, faisant une dizaine de soldats tués, selon le bilan donné par le ministère en charge de la défense du Niger.
Le Cadre de Concertation et d’actions Citoyennes de la Société Civile Nigérienne Indépendante (Ccac) de Tillabéri réclame le départ des forces armées étrangères présentes sur le territoire du Niger. En effet, cette organisation de la société civile dit ne pas comprendre qu’avec une forte présence des forces étrangères appuyées par des vecteurs aériens n’arrivent pas à anéantir les groupes armés terroristes (GAT).
C’est pourquoi, après le Mali et le Burkina Faso, des voies se lèvent au Niger pour demander le départ des forces françaises du territoire. En effet, le dimanche 12 février dernier, le Cadre de Concertation et d’actions Citoyennes de la Société Civile Nigérienne Indépendante (Ccac) de Tillabéri s’est réuni en session extraordinaire pour examiner la situation sécuritaire qui « prévaut dans la région de Tillabéri » et « les récents évènements » survenus en fin de semaine dernière dans la localité de INTAGAMEY dans le département de BANIBANGOU, région de Tillabéri. En effet, la localité a été victime d’une attaque djihadiste ayant fait une dizaine des soldats nigériens tués. A cet effet, le cadre de concertation se dit très « préoccuper » et « profondément » écœurer par ces évènements fâcheux et révoltants.
C’était suite à une déclaration lue par Adamou Oumarou Mamar que l’information a été donnée. Pour le cadre, cette attaque intervient au moment
où le dispositif sécuritaire de la zone est appuyé par des éléments des forces françaises, visiblement les nouveaux maîtres du terrain dont les capacités techniques et technologiques pouvaient maitriser ou prévenir des situations de ce genre sans grandes difficultés. « Mais malheureusement, c’est à ce moment que nous essuyions des pertes énormes faces à des forces irrégulières qui étaient d’ailleurs affaiblies et désorganisées par nos forces régulières et les combattants locaux et qui a fait régner une certaine accalmie dans cette zone », déplore le cadre de concertation dans sa déclaration.
Rappelons que le bilan donné par le ministère nigérien de la défense est de 10 militaires décédés, 16 personnes disparues dont 5 seraient trouvés mortes, 13 militaires blessés et 3 véhicules détruits. De ce fait, le CCAC/ SCNI dit marquer son indignation devant « ce lourd bilan qui selon plusieurs sources seraient nettement au-delà des chiffres avancés par le ministère ».
EXIGER LE DÉPART DES FORCES FRANÇAISES
Par ailleurs, le Cadre de concertation se dit consterner qu’avec l’intervention des vecteurs aériens que l’ennemi au lieu d’être anéanti se voit juste repousser. Cela, selon le CCAC, constitue une manœuvre qu’aucun nigérien ne saurait comprendre et admettre partant du principe que des forces françaises sont aux cotés des nôtres pour leur fournir tout l’appui nécessaire en
pareille circonstance. « Le cadre de concertation se dit rempli d’indignation devant la recrudescence de l’insécurité ces jours-ci dans la région de Tillabéri après une relative accalmie. La dégradation de la sécurité se manifeste par des incursions répétitives et fréquentes des groupes terroristes tout au long des frontières avec le Mali et le Burkina Faso où des villages entiers sont sommés de quitter sans compter les enlèvements des personnes et de bétails », déplore l’organisation.
En outre, le cadre de concertation dit aussi interpeller les autorités politiques et militaires et tous les citoyens nigériens épris de paix devant les responsabilités qui sont les leurs dans ce combat contre les forces du mal. « Il nous appartient tous, de nous lever comme un seul homme pour la défense de la patrie en faisant bloc autour des idéaux de paix », déclare-t-il.
Tout en réaffirmant son soutien aux forces régulières nationales, « soucieuses » de la sécurité du pays et de leurs concitoyens, le cadre de concertation « exige le départ des bases militaires étrangères dont la présence ne fait que nous desservir par la détention du monopole de la lutte sans être directement des combattants sur le terrain ». Le CCAC/SCNI a aussi exhorté, « l’ensemble des nigériennes et des nigériens » à se mobiliser pour faire « échec à ces forces obscurantistes » qui menacent la paix et la quiétude dans notre pays.
« NOS MILITAIRES SUFFISENT »
Depuis quelques mois, plusieurs organisations de la société civile contestent la présence des forces françaises sur le sol nigérien. En effet, en septembre dernier, des milliers des nigériens sont sortis, à l’appel du mouvement M62 qui rassemble des organisations de la société civile pour demander le départ de l’armée française sur le sol du Niger.
Pour rappel, quelque 3 000 militaires français sont toujours déployés dans le Sahel et notamment au Niger, un des principaux alliés de Paris après leur retrait total du Mali. Après une tension très tendue entre Bamako et Paris, les autorités de la transition du Mali avaient demandé le départ de la force Barkhane du territoire malienne. En effet, au cours de la manifestation, les manifestants nigériens arboraient des drapeaux de la Russie et brandissaient des pancartes « hostiles » à la France et à Barkhane. « Dégage l’armée française criminelle » ou « L’armée coloniale Barkhane doit partir », pouvait-on lire sur certaines pancartes dans cette manifestation autorisée par les autorités municipales de Niamey.
LE NIGER SUR LES TRACES DU MALI ET DU BURKINA ?
Le Mali et le Burkina Faso dirigés par des transitions militaires sont en froid avec la France. Suite à la demande d’une grande partie des populations des deux pays, les autorités ont décidé de résilier les Accords militaires qui les lient avec la France. Elles ont par ailleurs, demandé le départ des forces françaises sur leurs sols respectifs. Outre cela, le Mali avait suspendu les diffusions de Radio France Internationale et de France 24 sur l’ensemble du territoire malien. Une décision similaire a été prise au Burkina Faso pour Rfi et la chaine France 24 a été mise en demeure, le 7 février dernier, par le Conseil supérieur de la communication du Burkina Faso (CSC), pour avoir « injustement » attribué au gouvernement burkinabè, le terme « rebelles islamiques », en lieu et place de « groupes armés terroristes » qui avaient « enlevé une soixantaine de femmes en mi- janvier ».
Par ailleurs, au Niger, les organisations de la société se manifestent régulièrement pour demander le départ des forces françaises sur le sol nigérien. Ce qui, laisse prévoir que les populations nigériennes soutiennent l’idée d’un Sahel sans une présence militaire française. Comme d’ailleurs leurs voisins du Mali et du Burkina Faso qui ont déjà réussi leurs paris.
Pour rappel, les députés nigériens avaient largement voté, en avril, en faveur d’un texte autorisant le déploiement de forces étrangères sur le territoire, notamment françaises, pour combattre les djihadistes. Mais ce vote est fortement contesté par les populations, qui n’approuvent pas la présence militaire française sur le sol nigérien. La société civile accuse la France d’un « soutien actif » aux « djihadistes qui ont répandu le terrorisme à partir du Mali », voisin du Niger et du Burkina Faso.
Ibrahim Kalifa