L’ouverture du procès concernant l’affaire Thomas Sankara, père de la Révolution burkinabè assassiné en 1987, est fixée pour le 11 octobre prochain. Ce dossier, étouffé pendant vingt-sept ans, inculpe l’ancien président du Burkina Faso, Blaise Compaoré.
Le 4 août 1983, un coup d’État intervenait en Haute-Volta, devenue « Burkina Faso » (pays des hommes intègres) un an après et dirigé par le capitaine d’obédience marxiste-léniniste et ancien premier ministre, Thomas Sankara. Avec d’autres leaders comme Jean-Baptiste Lingani, Henri Zongo, Blaise Compaoré, il proclame la révolution qu’il va mener à travers le Conseil national de la révolution (CNR) dont il est le numéro un. Mais le 15 octobre 1987, alors âgé de 37 ans, il fut assassiné à la suite d’un coup d’État organisé par celui dont tous s’accordent à dire qu’il est son frère d’arme : Blaise Compaoré.
Le 15 octobre 1987, le père de la Révolution burkinabè, le capitaine Thomas Sankara, tombait sous les balles d’un commando. C’était lors du coup d’État qui a porté au pouvoir le capitaine Blaise Compaoré, « que l’on prenait souvent pour l’alter ego de Sankara » (Il s’appelait Sankara). Pendant les vingt-sept ans de règne de ce dernier, renversé par une insurrection populaire en 2014, le dossier de l’assassinat de Thomas Sankara a été étouffé au pays des hommes intègres.
Grande avancée
Le 17 août dernier, la date du procès de cet assassinat a été fixée par la justice burkinabè. Après la chute de Blaise Compaoré, le dossier classé 27 ans sans suite avait été rouvert par la transition politique d’alors. Ce changement du pouvoir a donné une nouvelle tournure au dossier de l’assassinat de l’ancien président du Faso.
Le départ de Blaise Compaoré du pouvoir a permis une grande avancée dans le dossier. Quatorze personnes, dont l’ancien président Blaise Compaoré, sont mises en accusation par la justice militaire burkinabè. Les charges ont été confirmées, le 14 avril dernier. Récemment, la chambre de contrôle de l’instruction avait renvoyé le dossier de l’assassinat devant le tribunal militaire de Ouagadougou. Depuis, le procès semble inévitable.
Affaire étouffée
Réélu pour un second quinquennat fin 2020, le président Roch Marc Christian Kaboré a fait de la réconciliation nationale l’une de ses priorités. Ce qui ne peut se faire sans la justice. C’est ainsi que le chef de l’État a ouvert la porte à un retour de son prédécesseur, en exil en Côte d’Ivoire depuis sa chute en 2014. Il a rappelé qu’il devrait répondre à la justice.
L’affaire Sankara, étouffée durant le règne de Compaoré, est, depuis des décennies, au cœur du débat public au sujet de la renaissance africaine. Jeune militaire progressiste, les idées de Sankara ont dépassé les seules frontières du Burkina Faso pour essaimer à travers le continent, faisant ainsi de lui un parangon de leader pour les jeunes qui, à travers des mouvements sociaux, s’en prennent aux citadelles de la dictature et de l’autocratie dans leur pays. Ce procès semble être l’une des priorités majeures du chef de l’État afin de réconcilier les Burkinabè foncièrement divisés. Et le président Kaboré, sur le plan politique, pourrait le mettre à son crédit. Certainement une bonne nouvelle pour les familles des victimes, plus de trente ans après l’assassinat de celui qui était considéré comme le modèle de la « révolution » pour une Afrique totalement indépendante. Une première victoire pour la famille de Sankara et les autres victimes. Apres ce procès, le Burkina Faso pourrait, enfin, tourner la page et par ricochet aller vers la réconciliation.