Les villes constituent dans le monde, les leviers au centre du développement. Construire des villes, c’est en quelque sorte mettre en place les mécanismes du développement que l’on souhaite atteindre. La ville peut déterminer, elle seule, la vision politique du développement sur plusieurs décennies dans un pays. Elles contiennent donc des grilles de lecture, mieux encore des indicateurs du développement projeté. Ainsi dans sa création et sa consolidation moderne, la ville nécessite un véritable travail d’échanges d’acteurs.
Consolider et construire des villes et des communes compétitives en concertation
La consolidation durable des villes, la création de nouvelles et la décentralisation matérielle dans une finalité d’équilibre nationale passeront, sans doute, par deux processus ou démarches majeurs et d’actualité : La concertation intra-communautaire et l’interconnaissance communautaire mutuelle. La raison est simple, sans la paix, la stabilité, il serait difficile de parler de développement, donc de grandes villes compétitives.
La concertation intra-communautaire est un processus qui, lorsqu’il commence, se devra de perdurer. Elle ne constitue pas uniquement un processus conduisant à un consensus total entre les acteurs, elle est le fondement de l’émergence d’une collaboration, mieux encore, d’une synergie et d’une bonne entente. Elle doit viser deux objectifs, l’interconnaissance au sein des groupes identitaires de proximité socioéconomique, historique, géographique et ethnique. Elle devra tenir compte de tous, même des plus « silencieux », car au sein des groupes ethniques identitaires, les membres se connaissent malheureusement peu. Cette concertation doit également permettre aux membres d’écrire l’histoire qui est la leur. Plus qu’une simple tendance à appliquer, dans le cas du Mali, la concertation est surtout un outil dont la mise en œuvre nécessitera de la technicité, de l’outillage et de moyens financiers, le tout accompagné d’une réelle volonté politique nationale largement soutenue.
La concertation devra également être intercommunautaire dans un deuxième temps. Car il est malgré tout important de reconnaitre que les communautés maliennes ne se connaissent pas assez pour tisser ensemble un « tissu social » national. Cette démarche devrait donc permettre aux groupes ethniques identitaires d’échanger sur leurs différentes histoires et mode de vie en essayant de s’échapper aux évidences et aux stéréotypes. Ces derniers handicapent l’interconnaissance au niveau national.
Il faudra donc retenir qu’il y a des préalables à la construction de la « nouvelle ville malienne ». Il sera nécessaire de passer par la stabilisation de la situation des territoires, actuellement au centre des travaux de la cellule nationale des villes, mais surtout de passer par la concertation dans le cadre d’une politique nationale des villes et des communes orientées vers la performance, la compétitivité, la cohésion sociale et la solidarité.
Consolider une politique nationale de la ville en misant sur la performance économique
Le constat est assez simple pour le Mali. Le pays connaitra une augmentation importante de sa population, 33,9 millions en 2035[1]. Cette augmentation de la population globale ne se fera malheureusement pas de façon homogène. Certaines zones géographiques connaitront une augmentation moins importante. Et de ce fait, la question des ressources, des services, plus précisément de l’accès aux services fondamentaux se posera.
Cet état de fait est encore largement possible à appréhender dans une nouvelle politique nationale prospective de la « futur ville malienne ». Cette politique nationale de la ville devrait tenir compte d’un certain nombre d’impératifs, au regard du constat évoqué. Dans ce sens, ériger en finalité la performance économique et la compétitivité pour toutes les villes et communes (nouvelles et anciennes) tout en s’inscrivant dans une optique qui permettra de relever les grands défis sociaux et écologiques de notre temps.
Au Mali, il serait sans doute intéressant, dès maintenant, de penser par le biais de cette politique nationale de la ville, la cohésion sociale, la solidarité entre les territoires et les populations dans le but d’accompagner l’amélioration des conditions de vie des populations.
Qu’il s’agisse du sud du pays, du centre ou encore du nord, les zones les plus en difficultés sociales et économiques cristalliseront le débat national. Ce ne serait pas une nouveauté. Il y a donc une raison assez suffisante pour prendre en compte cette question de cohésion sociale et de la solidarité entre les territoires et les populations.
Les travaux actuels des services de l’Etat axés sur la ville mettent beaucoup plus en exergue la finalité de stabilisation des villes et des territoires communaux. Ce qui peut se justifier avec l’actualité mais il demeure important de s’inscrire dans une politique nationale des villes aujourd’hui pour les décennies à venir.
La part des populations dans la création des villes modernes au Mali
En géographie, il est commun de rappeler que dans chaque vaste zone géographique, il faut une grande ville, qui constitue un grand carrefour à plusieurs finalités : économique, sociohistorique, stratégique etc. Mais, les géographes et les historiens rappellent surtout qu’il faut des populations pour donner du sens aux grands carrefours et aux grands édifices.
Dans le cas du Mali, il existe déjà des grands carrefours historiques, géographiques et surtout stratégiques. Cependant ces grands carrefours géo-historiques ne sont encore tous assez peuplés pour relever les défis. Des villes comme Gao, Kidal ou encore Tombouctou au nord ou encore Kayes nécessitent un accroissement stratégique de la population d’ici 2035. Plus encore et surtout au préalable, pour ces villes, doit être mis en place des plans territorialisés d’attractivité économique et de détermination de grands secteurs d’investissement et d’emploi. Ces plans viseront non seulement à décélérer et limiter l’ « immigration définitive »[2] mais également de rentrer dans cette perspective de futurs grandes villes.
[1] Rapport n° 44459-ML – Le Mali face au défi démographique Document de la Banque mondiale 30 juin 2008
[2] Une immigration sans retour