Acquitté depuis le 31 mars 2021 par la Cour Pénale Internationale (CPI) de crimes contre l’humanité en même temps que son coaccusé Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé attend toujours son passeport pour pouvoir rentrer en Côte d’Ivoire. Cela, alors que son mentor Laurent Gbagbo est rentré depuis le 17 juin dernier…
Sept mois après son acquittement définitif par la CPI des mêmes chefs de crimes contre l’humanité que Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé est toujours en phase d’attente pour fouler, à son tour, le sol ivoirien. Son absence pourrait empoisonner le climat politique et social de ce pays côtier d’Afrique de l’Ouest déjà fragilisé par de longues années de crises. L’ancien chef de file des mouvements de jeunes pro-Gbagbo espère rentrer au pays pour une « tournée de paix » avant de s’investir à nouveau en politique. C’est un appel à la réconciliation nationale qui apparait aujourd’hui comme une aspiration profonde du peuple ivoirien.
Cependant, notons que la réconciliation est un processus large. Un processus global incluant des instruments clés, notamment, la justice, la vérité afin de faciliter la cicatrisation et la réparation pouvant assurer la transition d’un passé divisé à un avenir commun. C’est aussi un processus aux implications profondes, impliquant aussi un changement d’attitudes, d’aspiration, d’émotion et de pratique cultuelle.
Si le retour de l’ex-président Laurent Gbagbo est perçu comme un acte favorable à la réconciliation nationale en Côte d’Ivoire, celui de Charles Blé Goudé qui attend son passeport depuis 7 mois, est plus que jamais nécessaire aujourd’hui pour aller vers la réconciliation. Le retour de Laurent Gbagbo et plusieurs de ses partisans a servi d’un grand pas à la cohésion sociale en Côte d’Ivoire. Car ce retour a permis la rencontre entre Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo, depuis 10 ans.
Au regard des épreuves vécues ces 10 dernières années, Charles Blé Goudé pourrait, espère-t-on, jouer un rôle d’apaisement et plus dans ce pays où la cohésion sociale peine à être un acquis. Après le double acquittement par la Cour pénale internationale (CPI), en première instance le 15 janvier 2019 puis en appel le 31 mars dernier au côté de son « mentor » Laurent Gbagbo, le chef des Jeunes patriotes a rassuré que les dix dernières années ont fait de lui un homme nouveau. Avec l’ardeur de celui qui a survécu à une défaite militaire puis à des poursuites de la justice internationale, Charles Blé Goudé fait tout pour apparaître comme un responsable qui rassemble les Ivoiriens.
La cohésion sociale, faut-il le faire savoir, risque toujours d’être un échec dans ce pays tant que certains acteurs de la crise comme Charles Blé Goudé restent hors du pays. Pour la paix, il faut que tous les ingrédients soient réunis. Car, ses partisans pourraient ne pas adhérer à tout processus de paix prétextant l’absence de leur leader. Toute chose qui ne fera qu’augmenter les rancœurs et frustrations. Aujourd’hui, le gouvernement ivoirien doit tout mettre en œuvre pour aller dans le sens d’une véritable réconciliation nationale. Pour atteindre cela, il faut inclure tous les acteurs importants de cette crise poste électorale de 2010-2011, y compris le président du Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des Peuples (Cojep). Le risque existe de réduire la réconciliation à une série d’étapes logiques. Une rechute est véritablement possible à chaque étape, et les étapes ne se suivent pas toujours dans l’ordre établi. Ces étapes étant toutefois des ingrédients essentiels pour une réconciliation durable, les autorités ivoiriennes gagneraient à trouver un moyen pour qu’il retourne auprès des siens.
Pour rappel, Alassane Ouattara avait donné le 7 avril 2021, une semaine après leur acquittement, son feu vert pour leur retour en Côte d’Ivoire. Contrairement à Laurent Gbagbo, précisait le président Ouattara, Charles Blé Goudé ne jouit d’aucuns avantages légaux. Puisque les autorités ivoiriennes ne reconnaissent pas son rang de ministre dans le gouvernement formé pendant la crise poste électorale.