Dans le projet de loi de finances 2022, le gouvernement prévoit, pour le secteur des infrastructures, un financement de 155,1 milliards de francs CFA dont 135,9 milliards de francs CFA au titre du financement intérieur (87,6 %), contre 10,1 % pour le financement extérieur. Le sous-secteur bâtiment et équipements représenterait 56,1 milliards de FCFA, soit 36,2 % du total des financements. Il est important de rappeler que ces financements dans le secteur du bâtiment sont entièrement réalisés par les ressources intérieures.
Lorsque le Mali sollicite des investissements directs étrangers ou des bailleurs de fonds pour financer ses projets d’infrastructures, il fait des appels d’offres internationaux. Dans ce cas, il y a peu de chance pour les entreprises nationales d’obtenir ces marchés. A contrario, quand il s’agit de marchés publics financés intégralement par l’État malien, une préférence est donnée aux entreprises nationales grâce aux clauses du code des marchés publics.
Ces clauses permettent aux entreprises locales de gagner quelques marchés publics, mais le nombre reste insignifiant. En effet, ce sont quasiment les mêmes entreprises qui remportent systématiquement les marchés publics pour des raisons légales et illégales. Si le mérite et l’expertise font partie de ces raisons légales, la corruption et le népotisme penchent plutôt du côté des raisons illégales.
Un secteur dominé par l’informel
Il est important de noter que le secteur du bâtiment concentre les activités les plus informelles du pays. Une infime partie des entreprises du secteur est déclarée. Les conditions de travail sont globalement dérisoires avec l’implication des milliers d’adolescents. Ainsi, sur les 4 000 entreprises de bâtiment et travaux publics (BTP) que compte le pays, seulement une centaine disposent du matériel et des compétences solides pour réaliser du début à la fin des travaux d’envergure. Certaines collaborent pour tisser des partenariats afin de faciliter la sous-traitance de spécialisation. C’est aussi dans ce cadre-là que plusieurs petites et moyennes entreprises dans le secteur du BTP profitent de ces opportunités pour se développer. Il est donc important qu’elles se regroupent pour être plus compétitives.
Au niveau de la croissance externe, les perspectives sont présentes et plusieurs entrepreneurs maliens tentent de capter d’autres marchés sous-régionaux, notamment dans les pays frontaliers. Par exemple, la Côte d’Ivoire est l’un de ces principaux pays porteurs, en raison de son importance dans les importations maliennes. On peut noter quelques entreprises maliennes dans le secteur du BTP qui évoluent sur le marché ivoirien. Ces entreprises arrivent à remporter quelques marchés issus d’appels d’offres internationaux de la part des autorités ivoiriennes.
Rôle indispensable de l’État
En termes de perspectives, le secteur du BTP au Mali pourrait être un moteur de croissance pour l’économie. Son poids dans le produit intérieur brut étant faible, le rôle de l’État est crucial pour booster le secteur. Les autorités publiques doivent davantage accompagner les entreprises de la construction en créant les conditions propices à son épanouissement afin que ce secteur vital pour l’économie soit un des moteurs de la croissance.
Il est urgent de rassembler tous les acteurs du secteur pour échanger sur les difficultés et les solutions idoines que l’Etat pourrait apporter. Aussi, il faudrait renforcer le partenariat entre l’État et l’OPECOM (l’Organisation patronale des entrepreneurs de la construction du Mali) pour travailler sur des points d’amélioration à court, moyen et long terme. Le Mali émergent n’aura de sens que si le secteur du BTP est pris entièrement en compte.
Amadou SY