Le ton est monté, cette semaine, du côté des autorités mauritaniennes suite à la disparition de leurs ressortissants à la frontière malienne. Apres l’annonce de l’ouverture d’une enquête qui situera les responsabilités, une délégation malienne est attendue à Nouakchott afin de désamorcer cette tension qui risque d’impacter les relations les deux pays.
La disparition de ressortissants mauritaniens à la frontière malienne plane le spectre d’une discorde diplomatique. Très en colère, les autorités mauritaniennes ont, dans un communiqué, accusé, mardi dernier, l’armée malienne « de crimes récurrents contre ses ressortissants », et d’ajouter que la vie de leurs concitoyens restera au-dessus de toute autre considération. Selon une source diplomatique à Nouakchott, quelques heures plus tôt, son secrétaire général recevait l’ambassadeur malien sur la même question. Aussi, plusieurs dizaines de personnes ont manifesté le mardi dans l’après-midi devant le ministère de l’Intérieur mauritanien avec des pancartes dénonçant « les agressions de l’armée malienne ». « Je suis révoltée. Il faut que cela cesse. On ne peut plus accepter que nos parents soient liquidés physiquement par l’armée malienne. Ces tueries récurrentes doivent cesser » déclarait une proche d’une des victimes. Cet incident fait le troisième du genre à toucher des ressortissants mauritaniens au Mali, en deux mois. Samedi, deux commerçants ont été blessés par balle alors qu’ils rentraient à Abel Bagrou, localité frontalière, révèlent certaines sources qui ajoutent également que le 17 janvier, les corps de sept éleveurs avaient été retrouvés près du village malien de Nara. Cette situation n’a pas laissé les autorités maliennes indifférentes surtout que c’est du côté de la Mauritanie qu’elles s’étaient tournées, en plus de la Guinée après l’embargo de la CEDEAO contre leur pays. Après l’annonce de l’ouverture d’une enquête, ordonnée par le Colonel Assimi Goïta, ce week-end une délégation malienne est attendue à Nouakchott. Il faut souligner que le gouvernement malien soutien que rien ne permet d’incriminer les Forces Armées Maliennes (FAMa) même si aucun élément de ces investigations n’a encore été rendu public.
Après la protestation de Nouakchott, les militants des droits de l’homme espèrent de leur côté, que les autorités maliennes puissent conduire une enquête sérieuse qui puisse fournir des informations fiables, vérifiables et s’il s’avère que des soldats maliens se trouvent impliqués dans ce crime, les autorités maliennes doivent prendre le devant avec des sanctions qui s’imposent. Ces mots forts du gouvernement et de la société civile au Nouakchott démontrent leur détermination à élucider les lanternes de ces récurrentes attaques contre les ressortissants mauritaniens sur le sol malien.
Selon des sources, le président de la Transition du Mali et le président de la Mauritanie ont eu un entretien téléphonique. Le colonel Assimi Goïta a exprimé à son homologue Mohamed Ould Ghazouani sa compassion sur le sort des ressortissants mauritaniens « disparus », mais, à ce stade, précise le communiqué du gouvernement malien « aucune preuve ne met en cause les Forces armées maliennes (Fama) qui respectent les droits humains et agissent toujours avec professionnalisme dans leur lutte contre le terrorisme ».
La situation devient inconfortable pour le chef de l’État mauritanien, car l’affaire a beaucoup choqué l’opinion publique. Mardi, un sit-in a été organisé devant le ministère de l’Intérieur à Nouakchott. C’est pourquoi il est nécessaire que des éléments de réponses soient apporté et que les responsabilités soient situées afin que les populations mauritaniennes soient apaisées. Entre temps, une mission malienne de haut niveau se rendra rapidement à Nouakchott. C’est une délégation musclée qui se rendra à Nouakchott : composé du ministre des Affaires étrangères, de celui de l’Administration territoriale, du chef d’état-major général des armées et du directeur des renseignements maliens. Le ministre des Affaires étrangères demande un entretien avec le président mauritanien, Mohamed Ould Ghazouani. Cette situation est inconfortable pour les deux parties. Bamako entend renforcer assez rapidement la coopération entre les deux pays dans le domaine de la gestion de leurs frontières communes, mais également dans les domaines de la défense et de la sécurité des biens et des personnes. Nous pensons que pour mener à bien ces projets, Bamako devra au moins s’engager à apporter des réponses au gouvernement mauritanien au risque de nuire gravement à cette nouvelle coopération. Le Mali sous pression terroriste soutient fermement son armée. Mais le pays est aussi sous sanctions économiques de la CEDEAO. Or la frontière mauritanienne représente l’un des derniers points d’entrée de marchandises sur son territoire. Les autorités maliennes devront donc se soumettre à un difficile exercice d’équilibriste. Dans un communiqué publié mercredi soir, le porte-parole du gouvernement a en tout cas affirmé que pour l’heure, « aucune preuve ne met en cause les forces armées maliennes » dans cette affaire. D’habitude il y a une circulation normale entre les deux pays. La Mauritanie et le Mali ont toujours vécu en symbiose, depuis les premières années de l’indépendance. Quant au regain de violence contre les Mauritaniens, « rien n’explique cela, analyse un fin connaisseur des groupes armés de la région. Si ce n’est que le Mali veut montrer des résultats, quitte à commettre des bavures. » Des renseignements français font état de « raids » menés par les Fama dans la région de Nampala, non loin de la frontière mauritanienne, et décomptent une trentaine de victimes civiles. Des opérations conjointes Wagner/Fama se poursuivent, provoquant aujourd’hui des déplacements de population. Ces informations venant des renseignements français viennent confirmer les craintes et les suspicions sur le fait que la France ne partira pas du Mali aussi facilement. Mécontents de leur sort, tout porte à croire que ces français s’amusent une fois de plus à jouer aux pyromanes dans le Sahel. C’est pourquoi le Mali et la Mauritanie doivent faire preuve de discernement pour tirer cette affaire au clair sans affecter leur coopération.