Alors que les défis de nature diverse (sécuritaire, géopolitique, économique, crise étatique) se multiplient et menacent la bonne conduite de la gouvernance publique, l’Etat malien vient de prendre une mesure très controversée. Il s’agit de l’adoption de la liste additive des membres du CNT que d’aucuns considère inopportune au regard de nombreux défis auxquels le pays fait face.
Il est certain, que, qui dit bonne gouvernance dit réduction de train de vie de l’Etat. Apres avoir frappé fort en venant au pouvoir, constatant des manquements signifiés par la grogne sociale tant exprimée par le peuple, l’actuel Chef de Transition au Mali en l’occurrence le Colonel Assimi GOITA vient de faire fort en prenant une mesure qui ne cesse de faire objet de discussions.
Rappelons que le Conseil National de Transition (CNT) est d’office l’Assemblée nationale sous la Transition actuelle au Mali. Tout récemment, nous avons remarqué que le président de la Transition a pris un décret présidentiel, le 28 octobre dernier, portant nomination de membres additifs du Conseil National de Transition qui passe de 121 à 147 désormais. Selon des sources sûres, cette initiative s’inscrit dans la lignée d’obtention du même quota qu’avait l’Assemblée nationale d’antan.
A noter que cette augmentation d’effectifs est du ressort des recommandations des Assises nationales de refondation, ainsi rendue effective par le biais de la révision de la Charte de Transition approuvée en février dernier par le Conseil national de transition (CNT).
Que peut-on retentir de ces nominations ?
De ces nominations, il revêt de pencher le regard sur quelques éléments qui pourraient attirer l’attention du citoyen lambda. D’abord l’ajout prend en compte 26 nouveaux membres. Parmi ces 26 nouveaux entrants, on peut citer la présence de l’ancienne Présidente du Conseil Consultatif National des Enfants et Jeunes du Mali, des anciens ministres et députés, augmentation des représentants des Forces Armées et de sécurité, considération accordée encore de plus au M5-RFP, des partis et groupements politiques, des organisations de la société civile, des groupements de femmes, jeunes, des groupes armées signataires de l’Accord pour la paix, des mouvements de l’inclusivité, des organisations de défense des droits de l’homme entre autres. Ces nominations interviennent à un moment décisif de la gouvernance au Mali, parlant de la Transition. Elles doivent naturellement interroger le portefeuille budgétaire de l’Etat, qui risque de ne pas être légèrement épargné par des dépenses, notamment les payements salariaux de ces nouveaux membres. Cela stipule une amplification financière. Pour rappel, le budget du Conseil National de Transition se chiffrait a un peu plus de 12,3 milliards de Fcfa en 2021. Il est passé à 12,4 milliards de Fcfa en 2022 soit une augmentation de 131 millions de Fcfa. Et là ce n’est pas encore fini, a l’horizon 2023, selon des sources fiables, l’avant-projet de budget affiche 13,3 milliards de Fcfa, soit une augmentation de 881 millions de Fcfa. Certes, ces augmentations budgétaires s’expliquent par la conjoncture internationale, mais, même si les salaires et les indemnités des membres demeurent intactes, cela ne dissipe pas l’inquiétude d’augmentation du budget et de la multiplication de responsabilités face aux enjeux qui minent le pays. Il faut dire que ces augmentations peuvent avoir des répercussions sur la scène politique. Sans doute, le risque d’une sorte de désaccord entre les autres organes de la Transition – des jugements n’en manqueront surtout pas. On cite par exemple le cas de la présidence de la République qui s’élève à plus de 20 milliards de Fcfa, soit près de 18 milliards l’année précédente. Quelle explication pourrait-on attribuer à cela ! La question demeure non répondue et les populations ayant connaissance de cela persistent dans le « que faire comme ce sont eux qui sont au pouvoir ». Pour dire que les choses fonctionnent intactement ainsi. Déjà, avec une des sorties d’un des députés dudit Conseil dans la semaine, il laisse entendre un sentiment de ras le bol par apport au cas présidentiel y compris celui du CNT. Il fait savoir des propos de questionnements. Notamment, qu’est-ce que ces nouvelles personnes pourront signifier en termes de valeur ajoutée que les anciens membres ont manqués de faire. Peut-être qu’on pourrait le comprendre surtout de sa provenance, parlant du Mouvement contestataire M5-RFP. N’eut été cela, on conçoit pratiquement les choses ainsi au Mali. Mieux, la Transition étant plus qu’à terme, ces augmentations peuvent servir de ralentissement dans le fonctionnement des institutions. Pourrait-on tenté de dire très peu d’utilité en ces moments à sens de traversée éphémère.
Qu’en est-il du slogan « les défis sécuritaires d’abord » et avant tout face à cette flambée budgétaire à caractère politique ?
La volonté de bien faire voire satisfaire les populations n’est pas exclue de la démarche de cette Transition. Force est de reconnaitre des réalisations sur plusieurs plans, notamment, des réformes politiques et institutionnelles, des grandes sorties au niveau de l’échiquier international (le cas des deux Tribunes des Nations Unies sous la Transition), la mise en place d’un organe unique de gestion des élections ainsi bien le renforcement capacitaire de l’armée nationale. Faisant focus sur ce dernier point, une chose interpelle. C’est que malgré ces efforts consentis, pourquoi la persistance des attaques par-ci et par-là, tandis que le verbe demeure « l’armée monte en puissance » au niveau de la capitale. Considérant ces manquements et prenant en compte l’augmentation budgétaire surtout pour le Conseil National de Transition, s’exprime un paradoxe. Doit-on préférer ce choix d’augmentation à celui de rompre les défis sécuritaires et d’autres problèmes du pays ? A analyser les choses, on peut estimer que la réponse ressemble un peu à ce qui est connu dans les faits même si elle est sous-entendue. Naturellement, il n’aurait pas eu de comparaison ou d’en faire une question de choix, si les choses se passaient autrement que ces constats. Pourquoi le risque de grogne comme précédemment annoncé, parce que le problème sécuritaire fut une des causes de la chute du régime du président IBK ainsi que des insatisfactions sociales. Vite le peuple fera recours à cette vielle tradition, élément de routine pour faire recours au fameux principe de désobéissance civile pour faire asseoir des régressions politiques.
Que peut-on retenir de cette augmentation aux yeux des défis sécuritaires ?
Cette augmentation est une mesure à goût divers. Elle est à la fois jugée la bienvenue et discréditée par certains. Pour ce qui est de l’aspect appréciation, il s’agit de la facilité du management bureaucratique. C’est qu’il y aura une bonne répartition de tâches. Mieux, cet élément peut traduire la volonté d’associer toutes les couches de la société à la gestion de la chose publique. Ce qui constituerait un tremplin pour elles de se faire entendre. Donc de l’inclusivité peut-on dire pour conclure. En ce qui concerne le second aspect relatif à discréditation, la multiplication de défis se voit à plusieurs niveaux, mais principalement sécuritaire. Sinon, nous avons le secteur éducatif qui traverse aussi des circonstances de grèves. A cela s’ajoute la cherté de la vie qui est devenue plus qu’un principe ou mode de vie. Le mal ici traduit une augmentation de dépense en termes de salaires pour ces ajouts de membres et de tout ce qu’y va avec connaissant l’énormité des défis sécuritaires.
Malgré que ces initiatives rentrent dans le cadre des préparatifs du terrain des élections présidentielles fixées en février 2024, mars 2023 pour le référendum constitutionnel et octobre 2023 pour les législatives. Cette décision qui a permis d’ailleurs la levée le 3 juillet dernier des sanctions économiques et l’ouverture des frontières avec les États membres imposées par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le 9 janvier 2022 à Accra au Ghana.
Connaissant le contexte actuel que traverse le pays, en tout état de cause, force doit revenir à faire cesser les tueries dans certaines provinces du pays et garantir tout court la sécurité. Pour ce qui est des augmentations budgétaires, il serait judicieux de ne pas les occulter mais que cela doit être un élément de second plan face aux défis sécuritaires. Il faut admettre que ces augmentations peuvent, certes concernées le dispositif militaire mais la priorité doit rester à ce niveau. Pour ne pas dire que ce n’est un peu pas trop nécessaire d’en faire une option politique maintenant. Pourquoi, parce que les vrais défis sont présents, il s’agit de comment donner à manger à ceux qui en ont besoin, comment faire revenir la quiétude au sein des populations confrontées à ces tas de problèmes, comment instaurer cette confiance en fuite perpétuelle, comment réouvrir les écoles. Entre une augmentation de membres du Conseil national de transition et les défis sécuritaires, le choix doit être bien fait en toute objectivité.
Seydou BAMBA