Exilé en Côte d’Ivoire depuis la chute du régime de son défunt père, Ibrahim Boubacar Keïta, le 18 août 2020, Karim Keïta semble se retrouver dans l’œil du cyclone et tout devient davantage compliqué pour lui.
L’affaire Karim Keïta a pris une autre dimension. Après le mandat d’arrêt international émis à son encontre en juillet 2021, par la Justice malienne dans l’affaire dite Birama Diarra, l’ancien député et président de la Commission défense et sécurité de l’Assemblée nationale du Mali, sous le régime de son défunt père, vient de se retrouver dans l’œil du cyclone de la Justice américaine. Ces ennuis judiciaires qui n’en finissent pas risquent d’impacter négativement sur son avenir politique dans ce pays où une transition politique règne depuis près de trois ans.
Le 9 décembre 2022, l’Office of Foreign Assets Control (OFAC), l’organisme de contrôle financier du département du Trésor américain a rendu public un document dans lequel il est reproché à l’ancien député et président de la Commission défense et sécurité de l’Assemblée nationale du Mali, sous le défunt régime, des faits de corruption allant du détournement de deniers publics à la réception de pots-de-vin dans l’optique de favoriser l’attribution de certains marchés étatiques à des entreprises. Il lui est également reproché de s’être arrangé, par l’intermédiaire du président d’alors, à mettre à la retraite « des fonctionnaires ne soutenant pas sa corruption ». Ce n’est pas tout. L’organisme de contrôle financier du département du Trésor américain estime également qu’il a organisé « des pots-de-vin » pour soutenir son père à sa réélection en 2018 à la magistrature suprême du pays. De même, en Côte d’Ivoire où il est exilé depuis le coup de force du 18 août 2020, le Trésor américain indique que Karim Keïta occupe le poste de PDG de la structure dénommée Konijane Strategic Marketing, désigné par l’OFAC comme société lui appartenant.
Puisque c’est de lui qu’il s’agit, le pays de l’oncle Sam a pris des sanctions musclées contre lui. Ainsi, il lui est interdit non seulement de fouler le sol américain, mais aussi, et surtout, ses biens privés s’y trouvant sont totalement gelés. Les États-Unis le soupçonnent de corruption en rapport notamment avec l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires en 2014, ou encore pour des accusations liées à l’extraction de ressources naturelles du Mali.
Cependant, il n’est pas le seul à être visé par le trésor américain. Une quarantaine de personnalités sont concernées par ces sanctions américaines, dont l’ancien président guinéen, Alpha Condé. L’Office of Foreign Assets Control (OFAC) les ont incriminées notamment pour des faits de corruption et de violations des droits de l’homme.
Pour se défendre, l’ancien président de la Commission défense et sécurité du parlement malien, sous le magistère de son père IBK, a fait un tweet dans lequel il affirme avoir « constaté que cette décision a été prise unilatéralement, sans recoupement aucun, ni aucun contact avec (lui) ». Tout rejetant en bloc ces accusations portées contre lui. Karim Keïta indique que celles-ci n’auront d’autres buts que de le salir. Ainsi, pour clamer son innocence par rapport aux faits qui lui sont reprochés, il affirme être « étranger ».
Selon des observateurs avertis de la scène politique malienne, ce cri de cœur semble avoir très peu de chance d’aboutir tant que l’intéressé ne se soumettrait pas à la disposition de la Justice malienne afin de tirer au clair l’affaire Birama Touré qui d’ailleurs fait l’objet d’un mandat d’arrêt international depuis juillet 2021.
Au-delà de l’aspect corruption, plusieurs autres accusations des faits de violation des droits de l’homme planent sur la tête de Karim Keïta, notamment dans cette affaire du journaliste Birama Touré, disparu depuis janvier 2016. Dans le même document daté du 9 décembre dernier, l’OFC reconnait, lui aussi, son présumé rôle dans la disparition de ce journaliste.
Apporter des éléments le disculpant
En effet, le seul fait de tweeter en clamant son innocence ne saurait disculper Karim Keïta dans cette affaire du Trésor américain. Surtout lorsqu’il est déjà sous le coup d’un mandat d’arrêt international, émis par la Justice malienne dans l’affaire dite Birama Touré, un journaliste disparu depuis 2016 et dont le corps n’a pas été retrouvé.
Cependant, même s’il arrive à s’en sortir du côté des États-Unis, cette affaire dite Birama Touré reste pendante devant les tribunaux maliens et il est fortement attendu pour apporter des éléments de preuves de son innocence.
Par ailleurs, le silence est perceptible du côté de la Justice malienne à moins que d’autres pays occidentaux emboitent le pas des États-Unis. Toute chose qui risquerait de compliquer davantage la situation de celui qui était considéré à l’époque comme le « fiston national ». Avec ces mesures d’interdictions, ajouté à la poursuite des autorités maliennes, l’avenir politique de Karim Keïta ne semble pas être rassurant.
Bakary Fomba