Le Niger, à l’instar de bien d’autres pays africains, n’échappe pas au phénomène de la corruption. Avec ses impacts négatifs sociaux et économiques, ce phénomène reste préoccupant dans le monde entier, notamment en Afrique où 60 ans après les indépendances, le continent africain peine toujours à se développer sur divers plans.
Au Niger, la corruption gangrène la plupart des services autant publics que privés. Ce, depuis plusieurs décennies, malgré les multiples instruments dont dispose le pays pour prévenir et réprimer les actes de la corruption et les infractions assimilées. Pour lutter efficacement contre ce fléau, le gouvernement nigérien semble plus que jamais déterminé à se faire entendre.
« Un recul grave et sans aucun progrès notable »
En vue de booster le développement économique du pays, le gouvernement nigérien envisage de consolider sa politique de lutte contre la corruption au sein de l’administration publique nigérienne. Dès lors, une véritable chasse aux pilleurs de deniers publics est engagée.
Plus qu’un slogan, la lutte contre la corruption et le favoritisme au sein de l’administration publique nigérienne est devenue un mode de gouvernance, un comportement de citoyen nouveau dans ce pays sahélien de la région ouest-africaine, et surtout une gouvernance vertueuse instaurée par le pouvoir actuel au Niger. Cela, pour protéger le peuple nigérien, (pris entre le marteau de la vie chère et l’enclume du terrorisme), des fossoyeurs de l’économie nationale ainsi que d’autres prédateurs des bonnes mœurs et de la morale.
En effet, les causes de la corruption sont en partie politiques et culturelles. À cela, faut-il noter, s’ajoute également l’inefficacité des poursuites judiciaires, qui peut encourager ce phénomène au sein des services tant publics que privés. Selon les constats, ce mal est plus élevé dans les pays à revenu faible et détourne constamment les dépenses publiques des services essentiels.
Ces dernières années, la corruption au Niger semblait devenue un phénomène banal dont les effets freinent le développement de l’économie nigérienne, augmentant ainsi les souffrances des citoyens déjà sous le cout de la vie chère et le problème d’insécurité. Sur 180 pays, le Niger est classé 124e avec une note de 31 sur 100, indique dans son rapport annuel de 2022, l’Organisation non gouvernementale (ONG) Transparency International. Selon les précisions du rapport 2021 de cette Organisation internationale, 62% des personnes interrogées ont estimé que la corruption a progressé durant les douze derniers mois au Niger, qui fait également partie des « 50 pays avec une corruption endémique avec un recul grave et sans aucun progrès notable dans la lutte contre la corruption au cours des dix dernières années ». Le pays occupe la 25e place sur le plan continental. Au Sahel, il est classé 5e, révèle le rapport de Transparency international.
Lutte implacable
Dans son discours d’investiture à la Présidence du Niger, en avril 2021, le Président Mohamed Bazoum avait promis une lutte implacable contre la corruption dans le pays. Ce phénomène qui met à mal l’économie et les compétences dans ce pays sahélien depuis tant d’années, en détruisant ainsi les espoirs de développement du pays. Un an après son arrivée au pouvoir, cette promesse semble sur le point d’être honorée. D’ores et déjà, la Haute autorité de la lutte contre la corruption et les infractions assimilées (HALCIA) a été mise en place, pour parvenir à démanteler les différents réseaux de favoritisme et de corruption au Niger. Mais pour mener à bien sa mission, faut-il dire, les autorités nigériennes gagneraient à tout mettre en œuvre pour l’adaptation des textes de cet instrument (HALCIA) juridique afin qu’il puisse élargir ses compétences et l’affranchir de certaines limites.
Le Président Bazoum a surtout dénoncé la prévalence d’une mentalité « pas toujours en harmonie avec les valeurs de l’État de droit et ses exigences relatives à la primauté de la loi ainsi qu’à l’égalité de tous les citoyens ». M. Bazoum appelle à se ressaisir et à faire preuve de rigueur pour se débarrasser de tels manquements qui s’écartent des normes définies par les lois et règlements en vigueur dans son pays.
Cependant, compte tenu de l’impact négatif qu’ont le favoritisme et la corruption sur la qualité et la performance des agents de la fonction publique, le Président Bazoum exige désormais de tous les responsables aux différents échelons de l’administration que les « cadres soient promus sur la base de leur compétence technique et de leur moralité ». Aussi, il promet que les responsables fautifs de l’administration publique répondront entièrement de leurs actes et ils n’auront aucun secours au cas où leurs comportements devraient commander « une mesure coercitive » à leur encontre.
En clair, Mohamed Bazoum ne semble pas faire dans la dentelle. Surtout lorsqu’il s’agit de défendre les intérêts de son pays, notamment ceux des populations qui lui ont largement accordé leur confiance. Le Président Bazoum n’a certainement pas fini d’ébranler les anciens codes qui ont fait de l’Afrique, le terrain de prospérité de la mal gouvernance, de la corruption, du détournement de l’argent public et de l’impunité.
Pour détournement présumé de deniers publics à hauteur de 3 milliards francs CFA (plus de 4,5 millions d’euros) lorsqu’il dirigeait la Société patrimoine des mines du Niger (Sopamin) entre 2013 et 2021, Mahamadou Zaga, ministre nigérien en charge de la Communication est désormais derrière les barreaux. Il s’agit d’un membre du gouvernement, de surcroit en fonction, qui est mis à l’ombre après s’être adonné au sport favori des dirigeants sous les tropiques. Cela montre à quel point le pouvoir actuel du Niger est engagé à aller jusqu’au bout de ce combat, tout en laissant ainsi une trace dans la lutte contre ce mal qui mine gravement l’économie nigérienne depuis tant d’années. « Le deuxième grand problème de notre gouvernance réside dans la prévalence de pratiques de concussion et de corruption au sein de l’administration. », a-t-il dit. Selon ses explications, la meilleure façon de lutter contre la corruption reste de « sévir contre ceux qui s’en rendent coupables ». Toutefois, a-t-il insisté « je serai implacable contre les délinquants parce que j’ai conscience du tort que porte la corruption au développement du pays. (…) Je me suis battu depuis mon jeune âge pour la promotion de la démocratie, parce que j’en ai toujours espéré deux choses totalement inséparables : la liberté et la justice ».
Un homme averti en vaut deux, dit-on très souvent. En tout cas, au regard de l’ampleur et surtout de la rigueur de cette nouvelle méthode adoptée par les autorités actuelles du Niger pour stopper la corruption et le favoritisme au sein de l’administration publique nigérienne doit servir de leçon à ceux qui envisagent de commettre les mêmes pratiques qui bouchent les lignes de développements d’un pays.
Conséquences économiques
La corruption est un constat d’échec de la gouvernance d’un pays, consistant notamment à nuire à l’efficacité économique et à l’équité. Ce phénomène qui reste la conséquence la plus novice d’une mauvaise gestion économique, détourne sans nul doute les ressources des objectifs de développement socio-économique et prive également les citoyens de services, notamment les pauvres qui peinent à subvenir à leurs besoins quotidiens. Surtout lorsque ceux-ci sont déjà confrontés à d’autres problèmes (la vie chère et le terrorisme).
Cependant, dans la lutte contre la corruption, enquêter sur la concussion et sanctionner les coupables en appliquant les lois ne semblent pas suffire à assurer des résultats durables si l’on ne tente pas de remédier à ses causes sous-jacentes et d’améliorer la gouvernance en général. La lutte contre ce mal étant une condition essentielle au développement durable et la réduction de la pauvreté, il revient à chacun de se détourner de cette pratique qui consiste à freiner le développement économique et social de nos pays.
Bakary Fomba, journaliste